Il faut sauver les terres agricoles !

Les villes ont pratiqué de longue date l’agriculture urbaine, en se construisant peu à peu, de façon organique. Toutes les villes anciennes possèdent des puits, très utiles en cas de siège. Le maraîchage fut inventé dans le quartier du Marais à Paris, qui compostait le crottin de cheval (des transports urbains) et exportait des tonnes de terreau par péniches au XIXe siècle vers la Normandie.

A la première difficulté ça recommence. Sur les Champs Elysées (encore très ruraux) pendant la guerre, dès 1940 ou en Argentine en 1991 – quand les banques ont refusé de rendre l’argent des petits déposants.

On sait que Detroit, capitale de la fabrication automobile, s’est reconvertie dans le maraîchage à partir de 2005. Au cours des années 1980 des jardinières en résistance dans Paris ont recueilli les souvenirs d’anciens maraîchers de la rue de la Roquette. Ça n’a jamais cessé.

La différence, de nos jours, c’est que l’extension de la ville attaque en priorité sa base alimentaire, les meilleures terres près desquelles elle s’est établie.

Deux exemples : les plus hauts rendements pour le blé dans ce pays s’obtenaient à Roissy en France et Marne la vallée. On sait ce qu’il en est advenu : parc de loisir et aéroport. Un autre bon exemple est Montpellier dont la plaine agricole jusqu’à la mer fut massacrée en très peu de temps : on moissonnait encore à Lattes dans les années 1990.

Dans l’esprit des ingénieurs, les terres basses sont les premières à développer, par des engins de travaux publics que des pentes ne viennent pas gêner (et même du coup, vous dira-t-on, ils dépensent moins de fuel). C’est encore le malheur de Notre Dame des Landes : ne pas se trouver sur une hauteur.

Mais autre différence avec le passé, les récoltes en ville contiennent désormais des polluants toxiques : particules de cadmium arrachées à la gomme des pneus, quel que soit le carburant, poussières de plaquettes de freins, suie de diesel cancérigène, etc.

Le jardinage urbain, très bénéfique et amusant, ne peut plus remplacer la perte de terres riches agricoles. Il ne faut pas perdre les sols fertiles où les plantes ne souffrent pas encore trop de l’ozone quand il fait beau, et de pluies acides par temps couvert.

Lors de la lutte pour la Loire sauvage, en 1988, de jeunes et brillants ingénieurs des ponts répondaient de bonne foi aux journalistes : « En quoi ça dérangerait les loutres si je bétonne les rives de l’Allier ? » Ils n’avaient pas même une teinture de biologie. Les amis du fleuve ont gagné. Aujourd’hui EDF compte les poissons dans les lacs de barrage.

C’est ce genre de reconversion qu’il faudrait obtenir des sociétés de travaux publics – lesquelles brûlent, dit-on, 1000 L de fuel par jour pour le moindre petit chantier.

paru sur Reporterre le28 novembre 2012

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