Plantes contre les pires pollutions

D’où vient qu’on nous répète de manger des fruits et légumes  ?  D’une étude de l’université de Berkeley, en 1992 (note 7 ci-dessous). Extrait du livre La Cité des Plantes, aux éditions Actes Sud (chapitre 7 )  :

les plantes portent secours

… des expériences sur les végétaux soumis aux méfaits conjoints de l’ozone et des ultra-violets montrent une augmentation du taux d’autres pigments : les caroténoïdes, de couleur rouge-orangé, capables d’absorber ces rayons. Du moins tant que l’excès d’ozone ne les détruit pas. Ces anti-oxydants fragiles se concentrent dans les fruits bourrés de graines, pour éveiller l’attention des animaux destinés à  les propager : lycopène rouge des Tomates et Poivrons, xanthophylles et bêta carotène des Abricots, des Citrouilles… ou dans les racines comme les Carottes, pâles à l’origine mais sélectionnées par les jardiniers pour leur teneur en pigment.

Sur la peau aussi, les  UV se combinent à la pollution oxydante, quand ils ne la suscitent pas, pour l’aggraver. Ils oxydent les acides gras essentiels, essentiels surtout à l’immunité[1]. Du coup, la membrane des cellules devient une passoire. Mais là encore, les plantes possèdent la parade, la vitamine E des huiles végétales, qui en bloque la dégradation par la lumière et les oxydants.

En 1989, ça commençait à se savoir que la pollution oxydante existe. Le laboratoire cosmétique Lancôme a mesuré la vitamine E des huiles et découvert que la noix de Macadamia en comportait le plus ; mieux, elle passe la barrière cutanée sans laisser de trace. Onagre, Bourrache, Arganier, nombre de plantes fournissent la précieuse vitamine. Le record actuel de teneur appartient aux semences du Figuier de Barbarie (Opuntia), le Nopal du Mexique, aux épines redoutables, difficiles à récolter. Une huile cependant encore trop chère, faute de fournisseurs.

La Grenade montre d’étonnantes vertus contre les brûlures, l’oxydation et les réactions de la peau (pigmentation)[2]. Enfin la dermatologie s’intéresse à la Calaguala Polypodium aureum, fougère d’Amérique, cousine du Polypode aux tiges à goût de réglisse de nos vieux murs. Chez les Mayas du Honduras, Calaguala passe pour une panacée. Elle fait une ravissante plante d’intérieur.

En anglais on dit « scavenger », charognard, mais c’est dans cette langue un terme positif . Disons enleveur de débris, nettoyeur de dépouilles, éboueur. On a testé douze extraits de plantes médicinales, tous contenaient des flavonoïdes capables d’éliminer les radicaux libres : Sauge sclarée, Sauge des près, Sauge glutineuse, Lavande, Souci, Matricaire, Echinacée, Potentille, Noyer, Mélilot officinal, Leuzea, (Rhapontium carthamoides) et Géranium aux longues racines (G. macrorrhizum). Ce dernier se montrait plus actif encore que la Sauge officinale, bien connue pour son pouvoir anti oxydant[3].

Le Cacao exerce une action anti oxydante sur le cerveau et dispense une légère euphorie. Les anthocyanes bleu-d’encre des Myrtilles régénèrent la rétine de l’œil[4] (les Bleuets, leurs cousins américains à pulpe transparente en contiennent moins). Le Céleri et l’Angélique protègent contre l’arythmie cardiaque[5]. Les plantes ne nous laissent pas seuls face à l’ozone… folates, resvératrol du Raisin[6], acides gras oméga 3, fibres même, la liste n’en finit pas.

En 1992, l’Ecole de Santé Publique  de Berkeley a conclu, par la synthèse de 200 études, que les populations qui consommaient le plus de fruits et de légumes connaissaient le moins de cancers[7]. On nous le répète à satiété, c’est l’une des rares préconisations démontrées. [8]

Nous avalons les goudrons de torréfaction du café et du chocolat; nous en respirons d’autres sans doute cancérigènes, depuis la nuit des temps autour des feux de bois. Le corps s’en sort avec les végétaux. Mais là dessus nous ingérons des polluants xénobiotiques, du grec xenos : étranger, synthétisés par l’industrie à des pressions ou des températures aberrantes, qui ne se dégradent plus. Le règne végétal aussi, fabrique des poisons violents (Strychnine), en revanche seuls quelques hallucinogènes végétaux résistent à la dégradation (…)

Certaines molécules de synthèse durent des décennies, voire des siècles autant qu’on en juge, sans parler les mélanges dont on ignore les effets. Le professeur Dominique Belpomme voit là voit une cause majeure de l’épidémie de cancers. Pour David Servan Schreiber toutefois, les bienfaits des plantes l’emportent sur les méfaits de la chimie. Il pense les pesticides responsables de sa tumeur, pour avoir joué, enfant, dans les champs de Maïs; mais semble parti pour vivre encore soixante ans, grâce aux médecines de pointe et aux vertus « anticancer » des végétaux[9].

Il ne s’agit pas de se gaver. Un régime léger conserve vieux et favorise la bonne marche du cerveau, probablement en le soulageant des oxydants[10]. Les habitants de l’Himalaya guérissent bien des maux en buvant de l’eau chaude. Même les vitamines peuvent tuer par l’excès, surtout les vitamines synthétiques, à croire la littérature. Car « le poison réside dans la dose » selon le mot de Paracelse (1493-1541) médecin/chimiste/alchimiste (c’était tout un). De plus, la teneur en anti-oxydants ne dépend pas seulement de la quantité ingérée. La recherche publique a découvert que les fruits, légumes et céréales biologiques contenaient davantage de vitamines et nutriments précieux que les autres[11]. La qualité de la plante enfin, et l’identité de ses composants, varient autour d’un type. Goethe (1749-1832) fut le premier à l’expliquer dans un livre génial qu’il faut lire pour comprendre les végétaux[12].

Le Thym natif des garrigues (…) ressemble l’été à un arbuste nain gris, rigide, presque épineux ; tandis qu’au Nord de la Loire il reste vert, élastique, peu odorant… du moins tant qu’on n’y touche pas. Les jardiniers du XVIIIème siècle l’utilisaient en allée gazonnée, doux et parfumé sous les pieds nus, chose impensable dans le Midi. Le climat modifie la plante, parfois même le micro climat. Une expédition de Francis Hallé, qui se dit disciple de Goethe à ses heures, a montré, dans un même arbre sous les tropiques, que l’ADN de la cime au soleil différait de celui des feuilles d’en bas, à l’ombre de la forêt[13].

Une plante selon le milieu élabore des créations complexes qui ne se limitent pas à un principe actif, notion très XIXème siècle un tant soit peu bornée. Jean-Marie Pelt et l’Institut Européen d’Ecologie de Metz qu’il a fondé, ont démontré par l’expérience les effets équilibrés, plus intéressants, des plantes entières pour obtenir leur Autorisation de Mise sur le Marché. Ainsi les médecins ont-ils retrouvé le droit en France de les prescrire à leurs patients.

Enfin, chaque corps humain, par son histoire, éprouve des attirances et des besoins particuliers. Ceci posé, voici des végétaux anti cancer parmi les plus précieux : Ail (et dans une moindre mesure, les autres Allium, Oignon, Poireau…), Brocoli (et autres crucifères comestibles), Cacao (anthocyanes, surtout dans le chocolat noir), Curcuma (moulu avec du Poivre dans le curry), Fraise, Framboise, Gingembre, Lin (graines moulues), Mandarine et autres Citrus (y compris zestes, biologiques bien sûr) Pomme (et ses pépins pleins de pectine, seul remède semble-t-il efficace à Tchernobyl)[14], Romarin (Thym, Menthe et autres lamiacées…), Thé vert (Camelia sinensis), fleur de Souci (Calendula).


[1] par les prostaglandines qui dérivent de ces acides gras et du cholestérol transformé par la vitamine D .

[2] S. Rout, R. Banerjee Free radical scavenging, anti-glycation and tyrosinase inhibition properties of a polysaccharide fraction isolated from the rind from Punica granatum Bioresource Technology volume 8, N°16 2007.

Mohammad Abu Zaid , Farrukh Afaq , Deeba N. Syed , Mark Dreher  and Hasan Mukhtar inhibition of UVB-mediated Oxidative Stress and Markers of Photoaging in Immortalized HaCaT Keratinocytes by Pomegranate Polyphenol Extract POMxPhotochemistry and Photobiology Volume 83 -4, 29 Jun 2007

[3] G.Millauskas, P.R. Venskuronis, T.A. van Beek, Screening of scavenging activity of some medicinal and aromatic plant extracts Food chemistry, vol 85, avril 2004.

[4] Nozomu Matsunaga ,Shunsuke Imai, Yuta Inokucho Masamitsu Shimazawa, Shigeru Yokota, Yoko Araki, Hideaki Hara, Bilberry and its main constituents have neuroprotective effects against retinal neuronal damage in vitro, and in vivo Molecular nutrition & food research, 2009, vol 53, N°7

[5] P. Kaufman, L Cseke, S Warber. J Dike, H Briellmann, Natural Products from Plants, CRC Press, Boca Raton et New York,  1999

[6] voir le chapitre 6 « alerte au chlore »

[7] G Block, B Patterson, A Subar, Fruit, vegetables, and cancer prevention: a review of the epidemiological evidence. Nutrition and Cancer 1992; 18(1):1-29.

[8] Michael S Donaldson Nutrition and cancer: A review of the evidence for an anti-cancer diet Nutrition Journal 2004, en ligne gratuitement sur http://www.nutritionj.com/content/3/1/19

[9] Anticancer David Servan Schreiber ed. Robert Laffont 2007.

[10] T.E Morgan et coll. Themosaic of brain glial hyperactivity during normal aging and its attenuation by food restriction. Neuroscience, Oxford, v.89, p.687- 699, 1999.

[11]Professeur Henri Joyeux, Mariette Gerber, Agriculture Biologique, Agriculture Conventionelle, Agricutlure Raisonnée,  ABACAR, INSERM, 2001. L’étude sur trois ans porte aussi sur les œufs, le fromage et les poulets

[12] Goethe, La métamoprhose des plantes, traduction Henriette Bideau, Triades 1973

[13] Francis Hallé, Plaidoyer pour l’arbre, Actes sud, 2005

[14] V.B. Nesterenko et col., Reducing the 137Cs-load in the organism of «  Chernobyl » children with apple-pectin, Swiss Medical Weekly, 134 (2004) p. 24.


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